Directive du Laakam à l’attention de toutes les institutions traditionnelles et associatives de la Communauté Bamiléké relative à la notion de Groupement et à la classification de nos Chefferies en Degrés
La maturité d’un peuple dépend pour une grande partie, de sa capacité de discernement historico-politique entre les préjudices subis d’une part, et les espoirs et ambitions de sauvegarde de son identité, de sa personnalité ainsi que de ses intérêts légitimes d’autre part. Ce postulat recèle un enjeu crucial, dans la mesure où ce qui est en cause, c’est la prise de conscience de la pertinence des valeurs sur lesquelles sont bâtis l’ensemble des symboles, des rites et des coutumes auxquels il se réfère.
Laakam constate, regrettablement, que nous continuons, de perpétuer pour désigner nos villages, l’appellation de GROUPEMENT. Cette appellation, véritable hérésie, n’est autre chose qu’une perpétuation des souvenirs cruels, des affres d’une histoire coloniale et administrative, faite de répression et de génocide, dont la stratégie consistait à vider nos villages pour les réduire en cendres par la suite, en ayant déporté les populations vers les bordures des axes routiers pour mieux les surveiller.
Laakam conforte du reste cette page sombre, en rappelant la déclaration du Chef de l’Etat français François Hollande lors de sa visite officielle au Cameroun le 03 Juillet 2016 : « C’est vrai qu’il y a eu des épisodes extrêmement tourmentés et tragiques même, puisqu’après l’indépendance, il y a eu une répression en Sanaga Maritime, et au Pays Bamiléké, et nous sommes comme je le fais partout, pour que les livres d’histoire puissent être ouverts, les archives aussi ».
Laakam recommande par conséquent à toutes les institutions et associations de la communauté d’abandonner cette appellation de GROUPEMENT. Cette appellation est donc inappropriée, et constitue le symbole de l’humiliation, de la répression et ultimement de la négation existentielle de nos villages indiscutablement organisés en Royaumes depuis des siècles, sur des bases initiatiques, mythiques et magiques sacrées.
Laakam appelle particulièrement l’attention des élites qui recourent à cette appellation sans cesse et de façon intempestive, et leur enjoint d’y mettre définitivement fin dans leurs écrits.
Laakam indique également, que la classification des chefferies selon des repères échelonnés en degrés (1er, 2ème et 3ème), ne correspond à aucune logique anthropologique, sociologique, historique, géographique ou même politique défendable. Cette classification abjecte est raisonnablement de nature à introduire une discrimination entre les Gardiens de nos coutumes, et conséquemment à fonder une quelconque importance ou considération d’un Roi par rapport à un autre. C’est absolument inacceptable de tous les points de vue.
Laakam souligne à cet effet, que de même qu’un Etat est un Etat au sens du droit international et jouit de la plénitude des compétences et de la considération sur son aire géographique, un Roi est un Roi, avec l’ensemble des attributs, privilèges, vénérations et considérations. Chaque peuple reconnaît ainsi son Roi et guide coutumier dans l’entièreté de ses pouvoirs, et manifeste à son égard une adhésion libre et légitime, qui n’est en aucune manière tributaire de quelle que classification que ce soit.
Laakam rappelle à ce propos, que le Roi, sa désignation, son règne, la considération de ses sujets, sa maîtrise des rites, son statut de gardien du patrimoine coutumier et traditionnel ainsi que et sa communion avec les Ancêtres, procèdent partout, d’une pratique initiatique unique, homogène, solide et incontestable consacrée sous la surveillance des Clans des Notables./.
Yaoundé, le 12 Février 2020
SINDJOUN POKAM,Plénipotentiaire
SHANDA TONME, Plénipotentiaire
12févr.